Matmatah. Quatre garçons dans le vent (de Brest).

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Matmatah est de retour. Combien de fois ai-je espéré pouvoir écrire ces mots ? Infatigable passionné, indécrottable pessimiste actif, j’ai toujours voulu croire au retour de ce groupe pour qui j’ai une tendresse particulière. Aussi loin que je m’en souvienne, je suis le parcours de ces quatre garçons dans le vent. Dans le vent de mon quartier, celui de Lambé si cher à leurs cœurs, où j’ai acheté la maison où je vis, à mon arrivée à Brest, au début de ce millénaire. Mais mon histoire avec Matmatah ne date pas d’hier, pour paraphraser un autre brestois souvent croisé dans les sous-sols et l’arrière boutique du Cabaret Vauban. Des souvenirs avec Matmatah, j’en ai plein ma besace, mais on ne fait pas un avenir avec du passé et des souvenirs d’anciens combattants. J’attendais Matmatah au tournant et notre amitié ne suffirait pas à leur passer un retour moyen, à leur épargner ma plume bien trempée. C’est dans cet état d’esprit critique et remonté à bloc (Jean Floc’h) que j’ai posé mon casque sur mes oreilles, en ce jour de printemps. Plates coutures s’annonçait bien, mais je demandais à voir.

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Plates coutures, nouvel album de Matmatah.

• Matmatah, index unique du rock hexagonal

Il y avait eu la compilation, d’abord, au nom évocateur. Antaology, comme pour rappeler les origines de ce groupe brestois auquel l’étiquette rock celtique avait collé aux basques aussi sûrement qu’un morpion aux couilles d’un mataf. Bref. Il y avait eu un ou deux signes avant-coureurs, annonciateurs que quelque chose pouvait se passer, qu’on était en droit d’espérer un petit miracle. Il y avait eu Tricératops, le seul mot de la langue française qui ne rime à rien et avec rien sauf peut-être avec choco pops. Quel bonheur ! J’avais pris ce titre dans mes esgourdes ramollies et j’avais réalisé que Matmatah n’avait rien perdu de sa faconde, de son énergie et de ces bonnes vibrations qui font la signature, l’identité sonore de cet index unique du rock hexagonal.

Sentiment partagé à l’écoute des Demoiselles de Loctudy, une ode à la Bretagne, à l’air iodé et piquant, cet air du large qui fait partie de l’ADN des bretons. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, on avait partagé ce plat de langoustines avec les plus brestois de choeurs, les inénarrables Goristes, venus poser leurs voix pour un bouquet final. Bref. Matmatah m’avait envoyé un signe. Le vent allait bientôt tourner. Et il tourna, comme une frégate virant de bord à 40 nœuds dans la rade de Brest.

• Matmatah is back in town

Tout est allé très vite. L’annonce d’une reformation, d’un concert aux Vieilles Charrues. D’une tournée, dans toute la France. Ainsi donc, Matmatah était de retour, vraiment ? Seul écueil sur la vague, l’absence de Sammy, guitariste du groupe, compositeur, chanteur (la voix de « L’apologie » c’était lui). Sammy avait décidé de débarquer du rafiot, comme Fanch Paillard quelques années plus tôt. Ah ! Sammy. L’un des membres fondateurs du groupe Matmatah s’en est allé voguer sous d’autres cieux, sa guitare sous le bras. Un retour à la source, période tricards. Sammy était-il irremplaçable ? Sûrement pas. D’ailleurs comme ne cessait de le répéter feu ma grand-mère, le cimetière de Kerfautras est rempli de gens irremplaçables. La suite de l’histoire lui a donné raison.

La suite ? Ce fut un mini-concert à Plougastel, à l’Avel Vor. Une demi-douzaine de titres, comme une remise à zéro des compteurs, des retrouvailles, une fête entre amis, un petit apéro, une mise en bouche. Avec une remise de couverts, dès le lendemain pour un set confidentiel et privé, dans un bar du port de Brest, le P’tit Minou. Un de ces endroits qui transpirent la bière, la sueur et la bonne chaleur de l’animal, si vous voyez ce que je veux dire. Je crois que c’est là que j’ai compris. Matmatah était de retour en ville.

le public du vauban pour le concert de matmatah nouvel album plates coutures 2017
Le concert de Matmatah au Cabaret Vauban a affiché complet en quelques heures.

Là-bas, j’ai croisé Ribette, mon cher Marco, le cinquième homme, patron d’Arsenal Prod. tourneur historique du groupe. Sur son visage, un large sourire et on le comprend. Les places du Vauban s’étaient écoulées en quelques heures, la plupart des dates étaient marquées sold out. Le vent avait tourné. Les fans répondaient présents. Matmatah était prêt à envoyer du bois, du lourd. On était prêts pour l’acte suivant et le groupe n’avait qu’une envie. Mettre tout le monde d’accord, à plates coutures.

• Plates coutures. Sans doute l’un des albums de l’année

Plates coutures. Matmatah. Play on. Je dois avouer que j’ai mis du temps à encaisser le choc et en vérité, je vous le dis sans ambages. Plates coutures est sans aucun doute l’un des meilleurs albums pop rock de l’année. Pas seulement par la grâce de ce son qui résonne de manière si intuitive aux oreilles de l’enfant du rock que je suis. Pas seulement parce que je reconnaîtrais la voix de Tristan Nihouarn entre mille. Pas seulement par fidélité à un groupe de mecs qui sont mes potes et que je connais depuis (presque) toujours. Non. Matmatah, avec Plates coutures, nous fait une proposition qui a du sens, d’abord par une qualité d’écriture qui, je l’avoue, rend admiratif et un peu jaloux l’amateur de bons mots que je suis. Il y a dans les textes de cet album un constat à la fois réaliste et cynique de l’état délétère de notre environnement écologique, social et politique.

Voilà, nous y sommes. Le constat est à la fois brutal et on pourrait presque s’en amuser. Clin d’œil plein d’ironie au monde flétri de la politique, les mots de Matmatah prennent une résonance quasi surréaliste si on les met en exergue avec les récentes affaires DSK ou Fillon. Dans Plates coutures, on retrouve les thèmes chers au groupe, entre légèreté des amours perdues ou suppliques pour que la flamme ne s’éteigne pas. Ou des thèmes plus graves, comme la destruction ou la négation de la civilisation dans Petite frappe. Les mots sont lourds de sens, certes, mais toujours amenés avec élégance. Des mots d’orfèvre, ciselés avec délicatesse, assénés comme un upercut. Voilà ce qui fait la marque de fabrique de ce groupe et qui n’échappe pas à une oreille attentive.

• Matmatah remet la ouache

Retour à la normale. Comme une invitation à remettre la ouache, on retient ce gimmick puissant et heureux qui colle à la peau, clin d’œil à Brest, son arsenal, aux fumées de Recouvrance et la foudre sur la blanche Cavale. Matmatah n’oublie pas d’où il vient. En assumant son passé, en inventant son avenir. Le public, lui non plus, n’a rien oublié, puisqu’il répond présent sur cette tournée qu’on peut désormais qualifier de triomphale. D’ailleurs il est des signes qui ne trompent pas, puisque le premier jour à avoir été annoncé complet au festival des Vieilles Charrues aura été le dimanche 16 juillet. Il n’est pas de hasard. C’est le jour où Matmatah est programmé, scène Glenmor. Un juste retour à la maison, neuf ans presque jour pour jour après avoir enflammé Kerampuilh, en juillet 2008.

Quant à la cohésion du groupe, elle aussi est intacte, à la ville comme à la scène. Tristan Nihouarn, en frontman, est toujours épaulé par Éric Digaire, basse, coté cour, qui pose aussi sa voix entre les lignes et Emmanuel Barroux, guitares, côté jardin, qui plante quelques riffs de bon aloi. Il faut dire que le garçon n’est pas un lapin de six semaines, puisqu’on a déjà aperçu sa tignasse flamboyante et son jeu incisif chez Aston Villa, entre autres. Derrière les fûts, c’est un vrai bonheur de retrouver Benoît Fournier (aka Scholl), digne héritier de la serpeta del barrio. Et aux claviers, le petit dernier, aussi juvénile que talentueux, Julien Carton tient les claviers. Il faut voir Matmatah sur scène pour réaliser que les gars de Lambé n’ont rien perdu de leur énergie.

J’en conviens. C’est compliqué d’écrire sur des gens qu’on aime, qu’on connaît depuis longtemps, avec qui on a vécu des jours radieux et quelques nuits d’ivresse. J’ai partagé beaucoup de bons moments avec ces mecs-là, c’est sans doute la raison pour laquelle j’appréhendais vraiment la première écoute de Plates coutures. Mais non. Finalement, le nouvel opus de Matmatah, c’est tout ce que j’aime. Du beau son, bien foutu, bien amené, bien réalisé. Des mélodies qui accrochent (oui, là, j’ai encore le gimmick de Retour à la normale qui tourne en boucle dans ma tête) et, surtout, des mots qui ont du sens. Il fait beau sur Brest. Le petit zef qui souffle est juste assez doux pour me rappeler que c’est le printemps. Plates coutures tourne en boucle sur ma platine et leur musique me rend heureux. Ça tombe bien, la musique, ça sert à ça. Nous allons vers les beaux jours.

• Matmatah, nouvel album Plates coutures, dans les bacs depuis le 3 mars 2017. En tournée dans toute la France et en juillet aux Vieilles Charrues (complet).

plus d’infos sur le nouvel album et la tournée de Matmatah sur le site officiel du groupe

Matmatah. Voyage au bout de la cinquième nuit.

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C’est dommage. Dommage que je n’ai pas gagné un euro chaque fois que quelqu’un m’a demandé pourquoi le site internet de mon book en ligne s’appelait Cinquième nuit. C’était pourtant assez simple. Le cinquième jour, celui où le créateur avait inventé les poissons, c’était le vendredi. Et le vendredi, c’était le dernier jour de la semaine (merci mon dieu), celui qui annonçait les nuits jusqu’à pas d’heure, dans cet endroit un peu mythique que j’avais découvert à mon arrivée à Brest. Le Vauban.

Ah ! Le Vauban. Je ne compte plus le nombre de concerts que j’y ai vus, le nombre de nuits passées dans cette salle de concerts, cet endroit merveilleux pour l’amateur de musiques et d’images que je suis. J’ai tellement de souvenirs dans cet endroit, que ma mémoire a dû en évacuer des pans entiers, plus ou moins glorieux. Qu’importe. Le Vauban restera à jamais le haut lieu flamboyant de la culture brestoise. Ce lieu dont Mistinguett disait, après une guerre qui avait massacré la ville, qu’il était le symbole de la renaissance de la vie.

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Cinquième nuit avec Matmatah.

J’en ai passé des nuits, à sillonner cette ville, du sud au nord, d’est en ouest. Du Vauban à La Carène, du Mac Orlan au Quartz, scène nationale. Comme le passager de la chanson des Stooges, j’ai traîné dans les endroits les plus élégants jusqu’aux bas fonds du port de commerce, dans des bouges qui sentaient la bière et la bonne chaleur de l’animal, pour reprendre les termes d’un illustre brestois. Mon corps a parfois regretté de ne pas être rentré plus tôt, mais ce que j’ai vécu personne ne pourra jamais me le voler. Une bonne photo faite n’est plus à faire, même si l’inverse est vrai. J’ai traîné mes godasses et mes reflex pour capturer des images, histoire de pouvoir témoigner, un jour de toutes mes cinquièmes nuits, tant elles furent nombreuses. C’est comme ça que le projet Cinquième nuit est né, il y a quinze ans.

• Matmatah. Rendez-vous au P’tit Minou.

Vendredi 17 février 2017. Port de commerce de Brest, à deux pas des grues géantes qui signent l’identité de cette ville, il y a un bar. C’est le P’tit Minou, clin d’œil à un lieu prisé des brestois, là-bas, un peu plus au nord, à Locmaria Plouzané. C’est là que j’ai rendez-vous pour une énième cinquième nuit et pas avec n’importe qui. Ce soir, c’est le retour de Matmatah, qui rompt le jeûne après neuf longues années d’abstinence, de silence et de pénitence. Matmatah revient à Brest, une semaine avant d’aller mettre la ouache au Vauban, un concert déclaré sold out trois heures après sa mise en vente.
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Le groupe brestois qui revient jouer dans un bar de Brest, voilà qui rappellera quelques souvenirs du siècle dernier, quand les Tricards Twins écumaient les estaminets brestoâs. La veille, déjà, les Mat’ nous ont servi cinq ou six titres à l’espace Avel Vor de Plougastel, mais ce soir, la set list est nettement plus cossue et mine de rien, les garçons n’en mènent pas large. Et ça, c’est plutôt bon signe.

• Un pétard ou un Ricard…

La set list s’équilibre entre quelques titres du nouvel album (Plates coutures, dans les bacs début mars), dont « Marée haute », un titre d’actualité, « Retour à la normale », « Nous y sommes » et quelques chansons désormais classées au patrimoine de l’humanité brestoise et qui ont fait les belles nuits de la cité du Ponant. Comme « Emma », « Crépuscule dandy » et l’inénarrable « Lambé an dro » qui colla l’étiquette rock celtique aux basques de Matmatah aussi sûrement que la vérole sur le monde. Mais un hymne reste un hymne et le public a explosé aux premiers riffs identifiants ce titre, comme une signature musicale.

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Après de nombreuses années de silence, la flûte de Tristan Nihouarn rejuoue la mélodie de l’apologie (crédit photo Hervé Le Gall Cinquième nuit)

Ah ! Entendre le public reprendre en chœur « si dans l’bus tu t’es fait pécho deus da Lambé dober an dro » ça fait toujours son double effet kiss cool. Mais pas autant qu’un « Pétard ou un Ricard, si t’as vraiment le cafard… » évidemment. Il faut d’ailleurs remonter très loin pour se souvenir de Matmatah chantant « L’apologie » sur scène, pour les raisons judiciaires que l’on sait. Tristan Nihouarn, la flûte en main, jouant la phrase musicale de ce titre culte, le public reprenant chaque mot de la chanson, on n’aura pas fait le voyage pour rien.
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• Plates coutures. Dans les bacs le 3 mars.

Une douzaine de titres et on sait que l’affaire est dans le sac. La tournée de Matmatah annonce un retour gagnant. Pour s’en convaincre, il suffit de regarder toutes les dates qui affichent des concerts complets, c’est un signe qui ne trompe pas. Mais le comeback des Matmatah n’est pas qu’un coup de nostalgie. Dans le public j’ai vu des têtes blondes qui n’étaient pas encore nées à l’époque de Rebelote et qui connaissent les paroles de « La cerise » sur le bout des doigts. Ça, c’est bon signe. Autant que les titres du nouvel album, « Plates coutures » qui s’annonce dans les bacs le 3 mars. D’ailleurs, de l’aveu même de Tristan, un nouvel album était une condition sine qua non pour un retour sur scène. Cette fois, nous y sommes. Matmatah is back in town. Mon voyage au bout de la cinquième nuit n’est pas prêt de se terminer…

voir la photo de Matmatah à l’Avel Vor le 16 février 2017

voir le site officiel du groupe Matmatah

• Matmatah en concert au P’tit Minou Brest, vendredi 17 février 2017, crédit photo Hervé LE GALL Cinquième nuit.

• merci à Matmatah (Tristan, Eric, Benoît, Manu, Julien), à Uptonpark (Julien), à Arsenal Prod (Marco), à Val, à Manu au son, Dan à la régie, à Cédric, Mathilde et au staff du P’tit Minou. Rendez-vous au Vauban.